Un bête label ou une belle bête

Qu’est ce qu’un label de performance énergétique ?

Écrire un article portant sur l’importance des labels de performance énergétique demande d’abord de définir clairement ce terme. Dans tout ce méli-mélo, notamment sur les bâtiments, qui délivre quoi ? Il y a tellement d’évolution sur ces étiquettes que l’on affiche pour faire bonne figure, que l’on peut légitimement se demander ce qu’elles valent vraiment. Où quelles sont leurs motivations première.

La labellisation est représentée comme un gage de qualité, certes, mais pas seulement. nous verrons cela plus loin. Elle est délivrée en général par un tiers indépendant, accrédité à délivrer ce genre de procédure. Cet organisme est donc en capacité (technique ou physique) de répondre et de suivre une démarche, disons le franchement, plutôt administrative. Cette méthode est donc clairement définit par des instances qui établissent les règles.

Il s’agit donc d’une formalité qui demande de répondre à certains critères. Des paramètres sont définis au préalable et portent sur des valeurs quantitatives. En effet, lorsqu’on parle de performance énergétique sur les bâtiments, il s’agit en général de consommer le moins possible.

Pourtant, sur un rapport d’étude thermique, il devient difficile de juger de la qualité. L’aspect normatif est tellement présent, que les rapports officiels d’études thermiques sont tous identiques, et ce, quel que soit le type de construction. En aucun cas, on regarde le fait de consommer mieux.

C’est bien normal, ils sont standardisés, ainsi pour un certificateur, c’est nettement plus simple de s’y retrouver.

Check liste performance énergétique
ça je coche, ça je ne coche pas…

Comme il n’est pas possible de faire autrement, le certificateur étudie donc une potentielle correspondance à des critères de performances sur la base d’éléments qu’il reçoit et préalablement unifiés.

Certifier dans la construction

Dans le milieu du bâtiment, à travers toutes les réglementations thermiques du passé et qui du futur, on étudie de manière à ce que l’ensemble des paramètres restent conformes à certaines exigences globales.

En général, dans les constructions neuves, les labels énergétiques poussent à l’augmentation ou à l’amélioration des performances par rapport à un niveau réglementaire de base. Cela a pour effet de tirer vers le haut les évolutions dans ces domaines si compliqués. Jusque-là, tout semble plutôt intelligent.

À travers l’historique des labels de performance énergétique, nous pouvons suivre l’évolution de la réflexion énergétique française. Voici un bref état des lieux des différents labels existant sur plus de 40 ans d’évolution.

Le premier label de performance énergétique a été établi lors de la première réglementation thermique en 1980 (label haute isolation via l’arrêté du 14 novembre 1980). Vous trouverez beaucoup d’informations sur l’histoire de la réglementation thermique sur Internet.

Mais ce que l’on peut dire, c’est que les niveaux de performance requis à cette époque n’ont rien à voir avec ceux d’aujourd’hui. Ces niveaux prenaient en compte le coefficient de pertes G (sorte de coefficient Ubat simplifié). De plus, les études étaient certainement réalisées à l’aide d’ordinateurs préhistoriques sur des cartouches où des disquettes qui ont disparu depuis.

performance énergétique haute isolation
Un des premier texte de la RT en 1980

À partir de là, c’est l’avènement d’une course à la performance puisque deux ans plus tard, ce niveau devient la norme et une nouvelle réglementation thermique voit le jour.

Les RT passent, la RT1988 la RT2000, la RT pour les bâtiments existants…

Avec la RT2005, de nombreux labels sont créés. Puis, c’est l’avènement du niveau BBC, il servira de référence pour la réglementation thermique RT2012.

Un enchaînement de règles

Et ainsi de suite, en se basant sur des retours d’expériences des labels de performance énergétique, les réglementations thermiques se renforcent et se complexifient. Elles subissent l’amélioration successive des décideurs qui se basent sur des systèmes conventionnels profondément ancrés dans un système.

Sur le terrain, des milliers d’ingénieurs et architectes travaillent à appliquer les règles en vigueur, en étudiant l’ensemble des composants qui constitue un bâtiment.

Les critères de performances thermiques de tous ces éléments sont passés au crible. En premier l’isolation bien sûr, mais découle ensuite les systèmes de chauffage, de ventilation, de production d’eau chaude ou d’éclairage dans les bâtiments tertiaires. En dernier on retrouve des critères telle que l’étanchéité à l’air ou les usages électriques mobiliers.

Les RT suivent une évolution et un raisonnement logique pour beaucoup de monde. Une quête d’amélioration et une recherche de confort qui pour les gens comme moi, expert de leurs sujets se passionnent pour la réduction des consommations énergétiques. Est-ce l’avenir ? En tout cas, un sujet important et majeur puisque tout le monde en parle.

Trouvez-vous que la vie est conventionnelle ?

Performance énergétique 100% garanti

Alors, on continue d’étudier la performance énergétique dans ces moindres recoins. On passe à la loupe la plupart des usages avec la RT2012. La certification devient une sorte de norme puisqu’elle mets en place des contrôles en fin de travaux et des tests d’infiltrométrie pour valider la conformité.

Jusqu’à aujourd’hui, début 2022 où cette nouvelle réglementation (la RE2020) prend un nouveau cap qui s’éloigne d’un objectif certain. Puisqu’elle perd pied dans l’étude des éléments carbone de chaque constituant d’un bâtiment. C’est-à-dire qu’en continuant d’étudier le bâtiment de cette manière, vos études thermiques s’éloignent d’un objectif de bien-être humain. Vous pouvez vous noyez dans l’infinité des études et des cas possibles et vous n’aurez jamais les bonnes réponses à vos interrogations.

Répondre à une labellisation

Dans une étude thermique réglementaire, l’énergéticien consciencieux d’un travail de qualité se doit d’intégrer la performance des composants et systèmes techniques qui existent dans le commerce. Cela a pour effet de ne pas se baser sur n’importe quoi et de passer pour un noob.

La veille technologique est donc primordiale pour ne pas fonder son expertise sur une pompe à chaleur des années 80 par exemple. Pour un isolant, des menuiseries, ou des matériaux statiques ça reste assez stable, mais pour les technologies ou des systèmes technologiques, ils évoluent très rapidement.

Les références des marques sont désormais saisies dans les études. Effectivement, il est nettement plus simple de sélectionner dans une base de données l’équipement qui sera posé plutôt que d’aller rechercher dans des catalogues l’ensemble des valeurs à renseigner. Et ça peut aller jusqu’à plus de 70 valeurs pour certains composants (les pompes à chaleur notamment) !

Alors, en tant que bon concepteur, dans un rapport de synthèse, on précède de la mention “à performance équivalente” pour ne pas risquer d’imposer un produit au client final (respecter la loi MOP en toute impartialité). Pourtant, c’est lors de la phase de réception que l’on peut constater certains écarts par rapport à ce qui était prévu.

Par exemple, il est possible d’observer qu’une machine installée n’a pas la même référence que dans l’étude thermique.

Conforme ou non-conforme, que faire ?​

intrus

Pour agir en toute transparence, la procédure RT2012 ou RE2020 exige de ne pas être juge et partie à la fois (mis à part pour quelques bureaux d’études peu scrupuleux). Le diagnostiqueur ou le certificateur effectuant une visite de contrôle peut constater des écarts.

Si un tel constat est effectué et présente effectivement des irrégularités par rapport à l’étude de conception, alors, il sera classé comme non-conforme. Et cela aura pour effet de ne pas pouvoir délivrer le précieux sésame.

Dans un sens comme dans l’autre, le certificateur pourra exiger des ajustements pour correspondre à la fameuse check-liste du label. C’est-à-dire, qu’il peut rechercher la reprise d’un cahier des charges pour que ça corresponde au chantier. Ou bien, il peut exiger la mise en conformité du chantier par rapport au cahier des charges. Dans tous les cas, une concertation est préférable.

Avec la recherche d’un objectif de calcul, il est effectivement moins onéreux de vérifier si l’objectif est toujours valide avec l’équipement présent. Dans ce cas, on corrige, et avec un peu de réflexion et la fourniture d’un justificatif prouvant l’atteinte des bons résultats, ça peut rester ainsi.

Mais dans un second temps, pour décoincer une situation ou si les performances ne sont pas atteintes, il sera nécessaire de corriger certains éléments ou composants de chantier. En effet, la mise en conformité d’un ouvrage peut revenir assez chère. Ça dépend du type de composant et de sa quantité.

Il y a donc une différence entre une labellisation et une certification, puisque la certification présente un critère de validité permanente. Elle est la finalité, le résultat de la labellisation, car on y attend un certificat, un papier correspondant aux différents critères étudiés et fixés pour ce gage de qualité.

Un os dans le potage​

Prenons un l’exemple d’un cas qui m’est arrivé récemment. Le diagnostiqueur me demande de corriger un produit saisi dans un calcul pour valider une conformité réglementaire. Il s’agissait d’un ballon qui n’avais pas la même marque que le ballon saisi. Il ne prendra pas le risque de valider un chantier avec produit différent, car cela discréditerait clairement son travail. Surtout si le client s’en apercevait.

Le BET est donc à nouveau sollicité par le prestataire ou le client pour corriger son étude thermique, refaire un calcul, et redonner le bon fichier.

C’est avec ce retour au concepteur qu’il peut y avoir une levée de voile de certaines absurdités. Simplement, pour une question de nom de référence dans un calcul : soit disant le ballon thermodynamique de la marque X étudié n’a pas le même nom que celui de la marque Y installée réellement, alors l’étude est recalée. On change alors le nom du produit dans l’étude. Bien évidement, les résultats sont similaires à la précédente étude, mais désormais, elle est conforme au chantier.

Oui, je vous parle d’expérience. Je ne suis affilié à aucun fabricant, mais ce cas s’est déjà présenté à moi. Et pourtant, les ballons sortaient de la même usine…

Je me demande alors quelle est la réflexion intellectuelle liée à tout cela, quel est le sens ? Si ce n’est que certaines choses deviennent vraiment chronophage et déresponsabilisent les gens. En continuant de la sorte, alors, la conception perd toute forme de valeur ajoutée.

L’oeuf ! Une de mes poules…

Elevez votre regard​

Pourtant, dans un processus réglementaire, aller chercher la performance des systèmes à la virgule près n’a que très peu de sens.

Prenons le COP (coefficient de performance énergétique) d’une pompe à chaleur. Les fabricants annoncent des valeurs admirables, repoussant toujours plus loin les limites des systèmes et de la technologie. D’année en année, toujours plus de gains annoncés pour des calculs. Je suis le premier à trouver cela surprenant.

Mais finalement augmenter un COP de 0,2 sur une bécane améliorant le résultat d’un calcul RT de quelques pourcents, n’a que peu d’impact dans le monde réel. Car la notion d’ordre de grandeur sur d’autres paramètres joue avec des chiffres que vous ne pouvez même pas imaginer. Encore faut-il savoir lesquelles ; où sur quel curseur agir.

Aucune réglementation thermique ni aucune labellisation ne vous dira comment fonctionne une pompe à chaleur. Ce n’est pas sont but. Savoir utiliser une machine correctement, c’est aussi comprendre comment elle fonctionne.

Si on ne sait pas, il faut savoir où se renseigner et ne pas hésiter à demander. Chose qui semble de plus en plus dépréciée vu l’impact que possèdent certains moteurs de recherches sur Internet. Pourtant, il y a certaines réponse à des questions qu’aucun moteur de recherche ne pourra vous apporter : votre libre arbitre.

C’est aussi pour ça que pratiquer l’énergétique de façon plus intelligente devient un acte militant.

Un résultat issu de l’histoire​

Il est tout à fait impossible pour un énergéticien comme moi de ne pas respecter les lois établies, car cela voudrait dire que je n’y prête aucune valeur. Pourtant, ce sont bien ces lois qui nous ont amenés jusqu’ici. Un point de rupture qui fait de la connaissance une arme redoutable.

La démocratie est ainsi faite, elle est la représentation et la volonté d’un peuple, dans une question de valeur et de niveau de vie équitable pour tout le monde. Cependant, il y a quelque chose de profondément inégal et injuste dans l’énergie du monde réel : le fait de savoir comment nous en sommes arrivés à réfléchir d’une certaine manière, en ce concentrant sur ce qui vous semble essentiel.

Car si vous souhaitez vraiment agir pour une transition, il faut bien d’autres choses que de simples calculs énergétiques. Vous devez recentrer vos études sur ce qui se passe à l’intérieur d’un local. Sur l’usage et l’expérience, plutôt que d’étudier comment il se constitue. Là vous pourrez prétendre à optimiser votre environnement.

La vie n’est qu’une infime part de hasard dans le vide intersidéral, elle s’accroche à ce qu’elle peut. Alors vous serez d’accord avec moi qu’aucun label de performance traitant les bâtiment ne pourra prétendre à l’améliorer.

A l’inverse, changer de cap pour remettre du sens au vivant, recentrer une labellisation sur des caractères plus humain. Est-ce que cela vous donnerait-il d’avantage de satisfaction ? Probablement, j’en suis désormais convaincu.

En tout cas, ça donne envie de se donner à fond, et en fonction de ce que vous savez, personne ne pourra vous le reprocher.

Mais soyons lucide, cela reste clairement impossible dans un système réglementaire tel qu’il est présenté actuellement.

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